Saut quantique dans la simulation des supraconducteurs

Un algorithme perfectionné par des chercheurs de l'ETH permet de simuler la supraconductivité à haute température beaucoup plus rapidement. L'équipe de recherche est récompensée pour cela par le US Department of Energy qui lui donne accès au superordinateur "Titan".

Vue agrandie : supraconductivité
Les simulations en supraconductivité n'excluent pas qu'elle soit possible à température ambiante. (Image : wikipedia)

Peter Staar, doctorant à l'ETH Zurich sous la direction du professeur Thomas Schulthess, a perfectionné pendant sa thèse un algorithme de simulation de corps solides tels que les supraconducteurs. Selon ses propres indications, cet algorithme permet aux chercheurs d'atteindre leur objectif exponentiellement plus vite qu'auparavant, dans certains cas même jusqu'à un milliard de fois plus vite. Avec le nouvel algorithme, ils sont parvenus à effectuer 15'000 trillions d'opérations de calcul par seconde - 15 pétaflops - sur le superordinateur "Titan" du Oak Ridge National Laboratory. Mais le nouvel algorithme ne fonctionne pas seulement plus rapidement, gr?ce à lui, les scientifiques ont également surmonté deux problèmes centraux dans la simulation des supraconducteurs à haute température. En outre, les nouveaux calculs montrent que les modèles les plus simples n'interdisent pas la supraconductivité à température ambiante.

Conduire le courant sans résistance

Les chercheurs eux-mêmes qualifient leur publication, avec laquelle ils ont été nominés pour le Gordon Bell Prize, de saut quantique dans la simulation dite time to solution (temps de résolution) de modèles de supraconducteurs à haute température. Le ministère américain de l'énergie reconna?t la performance de l'équipe avec son prix INCITE : elle recevra en 2014 du temps de calcul sur le superordinateur "Titan" d'une valeur d'environ deux millions de dollars.

Les supraconducteurs, et probablement aussi les supraconducteurs à haute température peu compris, sont constitués de matériaux dans le réseau cristallin desquels des électrons s'agencent par paires en paires dites de Cooper à au moins -234 degrés Celsius, ou -140 degrés Celsius pour les supraconducteurs à haute température. Dans le système, il se produit alors une transition de phase au cours de laquelle la résistance électrique du matériau devient nulle et le courant peut circuler sans perte d'énergie.

Jusqu'à présent, de telles transitions de phase ont été simulées de manière approximative à l'aide de l'algorithme DCA (Dynamical Cluster Approximation). Ce faisant, en raison de la complexité du système quantique à simuler et de l'intensité de calcul des particules interagissant entre elles qui en découle, seule une petite partie du réseau cristallin est simulée, un cluster d'atomes. "Avec les méthodes utilisées jusqu'à présent, cela fonctionne très bien d'un point de vue qualitatif", explique Staar, "mais il n'était pas possible jusqu'à présent de déterminer quantitativement la température exacte dite de saut, à laquelle une transition de phase se produit". Le problème central de DCA est que la température critique dépend fortement de la taille du cluster et de sa géométrie. "Cela ne nous permet pas de déterminer une température de saut uniforme et précise".

Des simulations plus pertinentes

Gr?ce à la révision et à l'extension de DCA par Peter Staar en un nouvel algorithme DCA+, les clusters ne sont pas calculés par étapes, mais en continu. Ainsi, le problème de la géométrie devient superflu et les résultats du cluster concordent, même si la géométrie a été modifiée par exemple par une rotation dans le réseau cristallin. Le nouveau procédé apporte une autre percée dans le problème dit du signal fermionique, qui se pose lors de la simulation de systèmes quantiques avec la méthode dite de Monte Carlo. Avec celle-ci, il n'est pas possible de déterminer explicitement la température de saut en raison des données mathématiques et physiques.

Avec le DCA+, le problème du signal fermionique n'est certes pas résolu, mais l'effet est retardé, explique Staar. "Cela nous permet d'atteindre le point où la transition vers la supraconductivité se produit et de déterminer la température de saut", mais pour lui, il est au moins aussi important que les nouveaux calculs effectués avec ce modèle simple n'excluent pas la supraconductivité à température ambiante. Si cela est confirmé par d'autres calculs sur des modèles plus complexes et spécifiques aux matériaux, cela pourrait relancer un débat qui dure depuis des décennies. Dans le domaine de la Science et ingénierie des matériaux, le développement des supraconducteurs est considéré comme un domaine prometteur avec de nombreuses applications potentielles dans la technologie énergétique et l'électronique. On rêve de supraconductivité à température ambiante depuis les années quatre-vingt, lorsque les supraconducteurs à haute température ont été découverts.

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