Les drones simplifient les animations de films
Animer des personnages de films de manière proche de la réalité demande un gros effort technique. Des chercheurs de l'ETH montrent aujourd'hui que cet effort peut être drastiquement réduit à l'aide de drones.
Les drones vont considérablement modifier l'industrie cinématographique. C'est en tout cas la conviction de Tobias N?geli. L'informaticien, qui a récemment terminé sa thèse de doctorat sous la direction d'Otmar Hilliges, professeur d'informatique et directeur de l'Advanced Interactive Technologies Lab, a déjà pu démontrer il y a environ un an que des scènes de film spectaculaires et techniquement très complexes pouvaient être réalisées beaucoup plus facilement avec ces petits objets volants. Maintenant, dans un autre travail qu'il a présenté début décembre lors d'une conférence à Tokyo, il montre que les drones ont également un grand potentiel pour les films d'animation.
Les drones remplacent des dizaines de caméras
"Si l'on veut représenter des personnages proches de la réalité dans un film d'animation, c'est une opération très complexe", explique N?geli. "Pour que les personnages paraissent naturels, on filme dans un premier temps un acteur qui exécute les mouvements. Pour que les mouvements de l'acteur puissent être reconstruits en 3D pour l'animation, celui-ci doit être filmé simultanément par au moins deux caméras. C'est justement dans le cas de mouvements amples que l'effort technique devient très important pour que la scène puisse être entièrement saisie par deux caméras positionnées de manière favorable. Il faut soit de nombreuses caméras installées à différents endroits, dont seules quelques-unes sont utilisées simultanément, soit d'autres installations complexes.
Cette technique co?teuse devrait désormais devenir superflue. En collaboration avec des collègues de l'ETH Zurich et de la TU Delft, N?geli a développé un système qui, dans sa version la plus simple, se compose de deux drones disponibles dans le commerce et d'un ordinateur portable. Les drones suivent l'acteur dans ses moindres faits et gestes, tout en adaptant leur position de manière autonome, de sorte qu'ils filment en permanence la personne visée sous deux angles différents. Les dépenses en caméras sont ainsi minimisées, car les caméras ne sont présentes que là où elles sont nécessaires. L'astuce : le système anticipe en permanence les mouvements de l'acteur et calcule ensuite où les drones doivent se diriger pour pouvoir garder un ?il sur lui.
Pour que la quantité de données soit la plus faible possible, des points de repère avec des diodes infrarouges sont placés sur les articulations de l'acteur. Les drones, équipés d'un pare-lumière de jour, ne captent alors que la lumière des points de marquage, ce qui simplifie drastiquement l'analyse des données. Le système ne voit plus que quelques points, à partir desquels il détermine ensuite la position et la direction du mouvement du corps.
"La particularité de notre système est qu'il peut aussi saisir de manière fiable des mouvements inhabituels et rapides", estime N?geli. "Bien s?r, en tant que système de démonstration, il ne satisfait pas encore sous cette forme aux exigences de l'industrie cinématographique. Mais c'est une approche prometteuse". En principe, explique le jeune chercheur, le système pourrait être étendu à d'autres drones afin de saisir des mouvements encore plus détaillés. Il est également envisageable de remplacer l'approche actuelle avec des points lumineux par une évaluation automatique des images. Cela permettrait de réduire encore les efforts techniques nécessaires pour filmer.
Analyser les mouvements sportifs par drone ?
Lors de différents essais, l'équipe a pu montrer que le système permettait de suivre des personnes sur de longues distances - un aspect qui rend cette approche également intéressante pour l'analyse des mouvements dans le sport. "Jusqu'à présent, il n'est par exemple pas possible de faire une analyse complète du mouvement d'un coureur, car cela serait beaucoup trop co?teux", explique N?geli. "Avec notre système, nous pouvons désormais étudier sans problème comment le modèle de course évolue au fil du temps".
Pour l'instant, tout cela n'est que musique d'avenir. Il s'agit maintenant de continuer à développer le système pour qu'il puisse être utilisé dans la pratique. Avec deux autres collègues, N?geli veut justement s'atteler à cette t?che dans la start-up Tinamu Labs qu'il vient de fonder. Et qui sait, peut-être atterrira-t-il bient?t à Hollywood avec ses drones.