Des subventions pour les combustibles fossiles : Comment s'en débarrasser ?

Réduire les subventions pour les énergies fossiles est judicieux d'un point de vue économique et écologique, mais politiquement impopulaire. Les réformes menées jusqu'à présent visent généralement à renchérir les combustibles fossiles - mais ne tiennent pas compte de la possibilité de les rendre tout simplement moins importants.

Besoin d'énergie bon marché : les combustibles fossiles sont fortement subventionnés dans le monde entier. (Image : MATJAZ SLANIC / iStock)
Besoin d'énergie bon marché : les combustibles fossiles sont fortement subventionnés dans le monde entier. (Image : MATJAZ SLANIC / iStock)

Début 2012, le gouvernement nigérian a réduit drastiquement les subventions au diesel et au pétrole, ce qui a entra?né un plus que doublement des prix locaux du carburant du jour au lendemain. De violentes protestations publiques s'en sont suivies, ce qui a incité le gouvernement à réintroduire rapidement les subventions.

Ce cas est certes extrême, mais il illustre un défi auquel sont confrontés de nombreux pays : malgré les avantages reconnus des réformes des subventions aux combustibles fossiles, la réalité de tels projets peut se transformer en cauchemar politique.

Les co?ts cachés d'une énergie "bon marché"

Selon les estimations, les subventions pour les combustibles fossiles s'élèvent à 300-500 milliards [1] jusqu'à 5,3 billions [2] de dollars par an dans le monde. De tels chiffres font dresser l'oreille, surtout si on les compare au soutien estimé aux technologies à faible émission de carbone (environ 120 milliards de dollars) ou aux ressources du Fonds vert pour le climat (jusqu'à 100 milliards de dollars). Mais ils ne montrent pas à quel point les réformes de ces subventions sont complexes.

Ces chiffres n'incluent pas, par exemple, le fait que ces subventions faussent les investissements et créent des vulnérabilités politiques et sociales lorsque les budgets nationaux atteignent leurs limites. Les réformes des subventions ont en effet souvent lieu en période de crise budgétaire, lorsque des organisations internationales comme le FMI interviennent en accordant des crédits et en exigeant en contrepartie que le pays bénéficiaire supprime les subventions aux combustibles fossiles. Mais en temps de crise, les gouvernements ne disposent que de moyens limités pour atténuer les conséquences négatives de la hausse des prix de l'énergie - surtout pour les groupes de population pauvres. Cela attise souvent la résistance.

Une "pratique d'apaisement" peu durable

Jusqu'à présent, réformer les subventions est généralement synonyme de réduire ou de supprimer les subventions. Il est souvent recommandé de coupler la réduction des subventions à une "stratégie d'apaisement" afin de s'attirer les faveurs des acteurs concernés. Une pratique courante consiste par exemple à indemniser, avec les fonds économisés, les groupes d'intérêts qui combattent particulièrement le projet de réforme. Mais de telles approches n'offrent qu'une solution superficielle à un problème socio-technique bien plus profond et ne sont guère durables.

Se focaliser sur la technologie

Nous pensons que : Celui qui veut réduire les subventions devrait également tenir compte du système énergétique sous-jacent. En fin de compte, c'est ce système qui pousse à la demande de combustibles bon marché, tout en générant des rentes économiques et politiques qui rendent la réforme des subventions difficile. Mais si l'on combine la réforme avec une politique qui crée des incitations pour le changement technologique du système énergétique, de tels projets peuvent être menés avec plus de succès.

Un exemple : Dans certaines régions d'Indonésie, on a réussi à supprimer les subventions au pétrole pour la cuisson. Le gouvernement a réduit les subventions pour le pétrole, mais a également veillé à ce qu'une grande partie des consommateurs puissent passer à des cuisinières alternatives utilisant du gaz liquide plus propre. Cette mesure axée sur la technologie a offert aux utilisateurs une alternative moins co?teuse et les a rendus moins dépendants du pétrole à prix réduit - ce qui a brisé l'opposition aux réductions. Une telle approche pourrait également fonctionner pour d'autres secteurs tels que les transports, l'industrie et la production d'électricité.

Repenser les réformes des subventions

L'approche axée sur la technologie change la manière dont nous abordons les réformes : Au lieu de se concentrer unilatéralement sur la coupure d'un flux financier dans une économie déjà affamée, elle génère une nouvelle activité économique, ce qui augmente à son tour les chances de succès de la réforme des subventions.

Prenons le secteur de l'électricité : les mesures de promotion des énergies renouvelables peuvent contribuer à ouvrir les secteurs énergétiques, souvent monopolistiques, à des producteurs d'électricité indépendants. Cela permet de créer des places de travail locales dans la construction, la maintenance et la production. Cela déplace à son tour l'équilibre des pouvoirs politiques dans les débats sur les subventions.

Avantages supplémentaires de la stratégie technologique

Dans de nombreux cas, les émissions de CO2-Les technologies à faible intensité de carbone sont déjà compétitives aujourd'hui. Un pays qui enrichit son mix technologique se rend finalement, ainsi que ses consommateurs, moins dépendant des combustibles fossiles et donc plus robuste face aux futurs chocs des prix de l'énergie. Il devrait également être dans l'intérêt d'organisations internationales telles que le FMI de soutenir et d'encourager financièrement cette approche axée sur la technologie. En effet, cela permettrait également de changer l'image de l'entreprise, qui est à l'origine de la hausse des prix de l'énergie et qui soutient la création de nouvelles places de travail.

Cet article est basé sur un précédentpage externeArticlepar Tobias Schmidt et Tyeler Matsuo dans le Courrier diplomatique.

Informations complémentaires

[1] Estimation des subventions à la consommation par l'Agence internationale de l'énergie (AIE) : page externeici.

[2] Estimations du Fonds monétaire international (FMI), qui incluent à la fois les subventions à la production et à la consommation et les externalités : page externeici.

page externeMatsuo, T. et Schmidt, T.S., 2017. Lettres de recherche sur l'environnement, 12(1).;

page externeSchmidt, T.S., Matsuo, T. et Michaelowa, A. 2017. Changement environnemental global;

page externeSchmidt, T.S., Born, R. et Schneider, M. (2012). Nature Climate Change, 2(7)

Vers les auteurs

Tyeler Matsuo

Tyeler Matsuo

Doctorante au sein de l'Energy Politics Group

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