Le Prix Hans Eggenberger 2019 décerné à Ileana-Cristina Benea-Chelmus

Avec sa thèse de doctorat, Ileana-Cristina Benea-Chelmus a apporté une contribution essentielle au domaine de l'optique quantique terahertz, dans lequel on étudie les phénomènes optiques quantiques à la frontière entre l'électronique et l'optique. Le domaine spectral du térahertz comprend des ondes électromagnétiques qui oscillent beaucoup plus rapidement que les micro-ondes et est donc particulièrement intéressant pour les futures technologies ultra-rapides, ainsi que pour l'étude des phénomènes fondamentaux dans ce domaine de fréquence. Cependant, le régime de l'optique quantique, dans lequel seul un petit nombre de photons contribuent à un effet, est resté jusqu'à présent inaccessible au rayonnement terahertz.

Ileana-Cristina Benea-Chelmus et ses collègues de l'ETH Zurich ont désormais comblé cette lacune. Ils ont considérablement amélioré la sensibilité ainsi que la résolution temporelle des mesures dans le domaine des térahertz, permettant ainsi de réaliser des expériences fondamentalement nouvelles. Ils ont notamment caractérisé pour la première fois le champ électrique qui oscille dans le vide après que tous les photons en ont été retirés : les fluctuations du point zéro. Cela a nécessité la détection de champs quantiques sur des échelles de temps plus courtes que leur cycle d'oscillation, tout en conservant une sensibilité extrêmement élevée aux champs électriques. Le succès a reposé sur l'optimisation de tous les aspects de l'expérience : optique non linéaire, mesures à faible bruit, fonctionnement à des températures cryogéniques, nanofabrication, automatisation et traitement de vastes ensembles de données.

D'un point de vue conceptuel, la thèse marque le début de l'étude des corrélations de champs quantiques dans ce que l'on appelle la limite d'Heisenberg - la limite fondamentale imposée par la mécanique quantique pour la précision des mesures - aux échelles de sous-cycles temporels et spatiaux. Les connaissances acquises apportent des éclairages fondamentaux sur la physique des fluctuations du champ du vide. Les nouvelles connaissances issues de ces études pourraient servir à l'avenir à comprendre les corrélations véhiculées par les fluctuations du champ du vide entre des systèmes physiques distants, tels que les atomes ou les systèmes quantiques artificiels.

Comme dans d'autres études fondamentales, cette recherche entra?ne également des développements dans des domaines d'application pratiques. De nouveaux détecteurs combinant des molécules aux propriétés optiques fortement non linéaires et des résonateurs térahertz sur verre et sur une plateforme de silicium présentent une sensibilité sans précédent. Compte tenu de la demande sans cesse croissante d'un contr?le cohérent des degrés de liberté photonique et électronique avec des pertes minimales, il sera bient?t indispensable d'obtenir des sensibilités de détection équivalentes à des fractions de photons térahertz individuels.

Outre l'attribution du Prix Hans-Eggenberger 2019 à Ileana-Cristina Benea-Chelmus, la Fondation Hans-Eggenberger soutiendra également ses recherches actuelles. En mars 2019, elle a commencé un post-doctorat à l'Université de Harvard, où elle approfondit ses connaissances et son expertise dans le domaine de la nanooptique à haute vitesse et de la photonique sur silicium. Ses compétences renforceront encore son profil dans le domaine de la recherche fondamentale sur les phénomènes quantiques sous-cycliques et le développement de dispositifs pratiques haut de gamme pour des applications industrielles.